La vie de Pascal aux années Port-Royal
Le père de Pascal, Étienne Pascal, était président du tribunal des impôts de Clermont-Ferrand . Sa mère mourut en 1626 et en 1631 la famille déménagea à Paris. Étienne, respecté comme mathématicien, se consacre désormais à léducation de ses enfants. Alors que sa sœur Jacqueline (née en 1625) figurait comme une enfant prodige dans les cercles littéraires, Blaise se montra non moins précoce en mathématiques. En 1640, il écrivit un essai sur les sections coniques, Essai pour les coniques, basé sur son étude des travaux désormais classiques de Girard Desargues sur la géométrie projective synthétique. Lœuvre du jeune homme, qui connut un grand succès dans le monde des mathématiques, suscita lenvie non moins dun personnage que le grand rationaliste et mathématicien français René Descartes.
Entre 1642 et 1644, Pascal conçoit et construit un appareil de calcul, la Pascaline, pour aider son père – qui en 1639 avait été nommé intendant (administrateur local) à Rouen – dans ses calculs dimpôts. La machine était considérée par les contemporains de Pascal comme sa principale revendication de gloire, et avec raison, car en un sens cétait la première calculatrice numérique depuis quelle fonctionnait en comptant des entiers. Limportance de cette contribution explique la fierté juvénile qui apparaît dans son dévouement de la machine au chancelier de France, Pierre Séguier, en 1644.
Jusquen 1646, la famille Pascal a tenu des principes strictement catholiques romains, bien quils aient souvent substitué lhonnêteté (« respectabilité polie ») pour la religion intérieure. Une maladie de son père, cependant, a mis Blaise en contact avec une expression plus profonde de la religion, car il a rencontré deux disciples de labbé de Saint-Cyran, qui, en tant que directeur du couvent de Port-Royal, avait introduit les conceptions morales et théologiques austères du jansénisme dans la vie et la pensée du couvent. Le jansénisme était une forme daugustinisme du XVIIe siècle à lépoque romaine. Église catholique. Il répudia le libre arbitre, accepta la prédestination et enseigna que la grâce divine, plutôt que les bonnes œuvres, était la clé du salut. Le couvent de Port-Royal était devenu le centre de diffusion de la doctrine. Pascal lui-même fut le premier à ressentir la nécessité de se détourner entièrement du monde pour se tourner vers Dieu, et il gagna sa famille à la vie spirituelle en 1646. Ses lettres indiquent que pendant plusieurs années il fut le conseiller spirituel de sa famille, mais le conflit intérieur lui-même – entre le monde et la vie ascétique – nétait pas encore résolu. Absorbé de nouveau dans ses intérêts scientifiques, il testa les théories de Galilée et Evangelista Torricelli (un physicien italien qui découvrit le principe du baromètre). Pour ce faire, il reproduit et amplifie des expériences sur la pression atmosphérique en construisant des baromètres à mercure et en mesurant la pression atmosphérique, à la fois à Paris et au sommet dune montagne surplombant Clermont-Ferrand. Ces tests ont ouvert la voie à dautres études en hydrodynamique et hydrostatique. Tout en expérimentant, Pascal a inventé la seringue et créé la presse hydraulique, un instrument basé sur le principe qui est devenu connu sous le nom de principe de Pascal: la pression appliquée à un liquide confiné est transmise non diminuée à travers le liquide dans toutes les directions quelle que soit la zone à laquelle la pression est appliqué. Ses publications sur le problème du vide (1647–1648) ajoutèrent à sa réputation. Quand il est tombé malade du surmenage, ses médecins lui ont conseillé de chercher des distractions; mais ce qui a été décrit comme la «période mondaine» de Pascal (1651-1654) était, en fait, avant tout une période de travail scientifique intense, au cours de laquelle il a composé des traités sur léquilibre des solutions liquides, sur le poids et la densité de lair, et sur le triangle arithmétique: Traité de léquilibre des liqueurs et de la pesanteur de la masse de lair (traduction anglaise, The Physical Treatises of Pascal, 1937) et aussi son Traité du triangle arithmétique. Dans le dernier traité, fragment du De Alea Geometriae, il a jeté les bases du calcul des probabilités. Cependant, à la fin de 1653, il avait commencé à ressentir des scrupules religieux; et la «nuit du feu», une «conversion» intense, peut-être mystique quil a vécu le 23 novembre 1654, il a cru être le début dune nouvelle vie. Il est entré à Port-Royal en janvier 1655, et sil nest jamais devenu lun des solitaires, il na par la suite écrit quà leur demande et na plus jamais publié en son nom propre. Les deux ouvrages pour lesquels il est principalement connus, Les Provinciales et les Pensées, datent des années de sa vie passées à Port-Royal.